Danser notre humanité en Dieu
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Si le livre de l’Exode raconte le pèlerinage du peuple juif depuis l’Égypte jusqu’aux portes de la Terre Promise, son récit est d’abord construit de manière à laisser entendre la spiritualité qui habite ce mouvement. Plus qu’un simple déplacement dans l’espoir de trouver sa place dans le monde et de s’y installer définitivement, le mouvement dont il est question apparait plutôt comme une spiritualité de l’impermanence qui invite tout un peuple à l’écoute de motions qui se dessinent en art de vivre.
À toutes leurs étapes, lorsque la nuée s'élevait au-dessus de la Demeure, les Israélites se mettaient en marche. Si la nuée ne s'élevait pas, ils ne se mettaient pas en marche jusqu'au jour où elle s'élevait.
(Exode 40, 36-37)
La nuée est faite de mouvements, comme une nuée d’oiseaux. Elle ne bouge jamais seule cependant! C’est la multitude qui bouge dans un grand ballet.
Dès lors, l’individu qui choisit d’être à l’écoute de « Je suis » (Ex 3,14) demeure dans l’attente de cette « nuée », de cette motion, qui le prendra et l’invitera à faire un pas de plus dans un être ensemble qui danse avec la nuée. Jamais installé, toujours prêt à reprendre la route, happé par un relationnel tout autre, l’écoutant harmonise son pas avec celui de la nuée qui annonce Dieu. Comme le danseur guidé par le rythme de la musique, il se laisse souffler le mouvement à effectuer.
Du lieu de cette écoute harmonisée, l’humanité danse en Dieu.
Partenaires qui enchantent la vie, lui donnent de la couleur et de la vigueur, nous trouvons dans cette union une joie intarissable qui se traduit par une manière d’être. Écouter, prendre parole, tendre la main, accueillir, faire place, relever, prendre soin, courir, s’arrêter, rire, pleurer, souffrir, se retirer… sont autant de mouvements, autant de pas de danse, qui disent notre relation en Dieu. C’est d’ailleurs l’une des rares fois où nous puissions avoir l’assurance de « ne pas prononcer le nom de Dieu en vain » (Ex 20,7), en disant « Je suis » alors que nos pas s’inscrivent dans cette danse.
Demeurer dans cette écoute manifeste ainsi un art de vivre où la seule option possible pour vivre pleinement, celle de l’Exode, impose de ne pas se fixer mais d’être en mouvement. Toujours à l’écoute de « Je suis », non pas de « moi », j’apprends à danser en Dieu et j’y trouve mon accomplissement.
Éric Laliberté
Centre de spiritualité Manrèse