L’épreuve d’Abraham
(Détail de l'oeuvre de Rembrandt, le sacrifice d'Isaac)
Le récit de Genèse 22 semble présenter l’image d’un Dieu cruel qui impose à Abraham une épreuve incompréhensible : lui sacrifier Isaac, son fils unique. Même si les historiens nous expliquent que les sacrifices humains étaient pratiqués chez les peuples voisins, l’attitude du patriarche qui lève le couteau heurte notre sensibilité : comment un père peut-il consentir à poser un tel geste ?
La manière habituelle de surmonter les difficultés du récit repose sur la clé d’interprétation proposée par le narrateur dès le premier verset : puisqu’il s’agit d’une « épreuve », Dieu ne veut pas vraiment que le patriarche lui sacrifie son fils. Il cherche à éprouver sa foi. Si l’auteur du récit met en scène une épreuve aussi difficile, c’est pour mettre en relief la profondeur de la foi d’Abraham.
Un problème rarement soulevé quand on aborde ce récit vient de la traduction proposée du deuxième verset [1]. En hébreu, la phrase est ambivalente et peut se traduire de deux manières différentes : « Fais monter ton fils sur la montagne pour un sacrifice » ou « fais-le monter là comme holocauste ». Dans la première traduction, Isaac est un témoin et dans l’autre, une victime. Comme il n’est pas possible de préserver cette ambivalence en français et puisqu’Abraham semble prêt à sacrifier son fils, les traductions présentent habituellement Isaac comme une victime.
Dieu verra pour l’agneau
Quand on tient compte de cette ambivalence du texte hébreu, on comprend mieux le lent développement du récit et la tension qui ne cesse d’augmenter jusqu’à l’intervention de l’Ange du Seigneur. Le narrateur ne rapporte pas le dialogue intérieur du patriarche mais sa réponse à la question de son fils – Isaac remarque l’absence de la bête qui sera sacrifiée – permet de penser qu’il espère trouver une alternative au sacrifice de son premier-né.
Dans cette épreuve, le patriarche revient à la case départ et reprend son itinéraire avec Dieu avec la même disponibilité : « Me voici », dit Abraham à plusieurs reprises. « La grandeur d’Abraham est d’avoir choisi la logique du don qu’il avait apprise de Dieu lui-même, sans pour autant cesser d’aimer Isaac – ce dont témoigne sa retenue jusqu’à l’instant fatidique de l’appel du messager. » [2]
En un lieu symbolique, la montagne, on assiste à l’échange d’un don, donné par Dieu et redonné par Abraham. Le patriarche a surmonté l’épreuve car il n’a pas agi comme s’il était propriétaire du don reçu en gardant son fils pour lui. Le don et le contre-don ouvre un espace de communion et la promesse divine est non seulement réaffirmée mais scellée sous la forme d’un serment (vv. 16-18). Rien d’étonnant que cette page soit considérée par plusieurs comme un sommet de la Bible hébraïque. Quand notre espérance est mise à rude épreuve, le patriarche est un modèle qui peut nous inspirer encore aujourd’hui.
Sylvain Campeau, bibliste
[1] Voir André Wénin, Isaac ou l’épreuve d’Abraham. Approche narrative de Genèse 22, Bruxelles, Lessius (Le livre et le rouleau, 8), 1999, p. 36.
[2] A. Wénin, Isaac ou l’épreuve d’Abraham, p. 91.
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