Allez jusqu'au bout
Luc 14, 25-33 : 23e Dimanche du temps ordinaire (Année C)
Oeuvre : Engelbert Mveng, s.j., Via Crucis V, 1962, chapelle, Faculté de théologie, Nairobi
Devenir disciple de Jésus, c'est faire route avec lui jusqu'au bout du chemin, qui conduit à Jérusalem. Cette marche n’est pas facile. Pour en indiquer les exigences, Luc n'y va pas par quatre chemins! Devenir disciple implique des ruptures face aux valeurs qui composent notre vie habituelle. Ici, trois réalités, que nous considérons sacrées, sont relativisées : la famille, sa propre vie, ses biens. Jésus appelle carrément à un détachement et à une recomposition de nos priorités. Pourquoi? Parce que sa voie conduit à un affrontement et les demi-mesures ne permettent pas de tenir sur ce chemin. Face à l'adversité des puissants, à l'indifférence de plusieurs, aux résistances que rencontre l'annonce du Règne, pour continuer, il faut des options fortes, profondes, qui établissent clairement nos orientations de vie.
Les deux images employées pour parler du renoncement, la construction de la tour et les préparatifs de guerre, sont étonnantes. Les deux invitent à bien réfléchir, à peser sa décision, à faire des choix lucides avant de s'engager. Devenir disciple n’est pas présenté ici comme une adhésion enthousiaste et spontanée, mais comme un choix dont on calcule les coûts et conséquences. La suite de Jésus est aussi option consciente et risque à prendre. En bien des pays aujourd'hui, cela est évident. Devenir chrétien, ou s'enligner sur des valeurs évangéliques, porte à conséquences. Parce qu’on choisit de marcher avec les plus pauvres, qu'on refuse le cycle des violences, qu'on promeut le dialogue, qu'on s'élève contre la médiocrité et les fatalismes, on peut perdre sa réputation, son emploi, ses liens familiaux et même sa propre vie. Comment tenir de tels engagements, si son choix n'est pas solidement pris, avec un don de soi entier, qui ne dérive pas au gré des pressions de clan ou de classe, de l’attrait du confort tranquille, de la peur d'être mis de coté ou de souffrir dans sa peau.
Nous aimerions parfois un évangile qui se contente de conforter nos quêtes immédiates de sécurité sans rien déranger de nos priorités et de nos attachements. Une sorte de léger surplus de sens, qui s’ajoute de l'extérieur à nos mondes déjà établis. Mais l'évangile vient nous chercher autrement, du dedans, au coeur même de nos options et de ce qui est sacré pour nous. Et il désacralise bien des réalités qui nous tiennent à coeur. Il ne les rend pas sans importance mais les situe dans un horizon de sens différent, plus vaste. Il met au centre de nos vies le mystère pascal et le visage du crucifié-ressuscité, figure du Dieu vivant.
Avant de s'engager sur un chemin aussi déroutant, il vaut la peine de s'arrêter, de s'asseoir et de penser à son affaire. Les renoncements pour devenir disciple ne relèvent pas d’une passion déraisonnée ou d'un culte de la misère mais d’une sagesse de vie, d'une fidélité lucide, sans illusions ni fausses peurs, qui connait le prix de ce qui est choisi. Ce choix ne rend pas isolé; au contraire, il fait entrer dans une solidarité nouvelle, celle des disciples avec qui marcher et trouver soutien. La vie de disciple demande un don sans réserve. Si on y met le bras, tout le corps risque d’y passer! Aussi bien de le savoir en partant, si on veut aller jusqu'au bout.
Questions pour la réflexion :
À quelle recomposition de mes priorités cet évangile m'appelle-il?
Qu'est-ce m'aiderait à solidifier mon option de suivre le Christ?
Je m'assois et je pense à ma vie de disciple : les coûts, les possibilités, les choix, ..
Daniel Cadrin, o.p.
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