Un feu sous la cendre

Jérémie 20,7-9
22^e dimanche du Temps ordinaire
30 août 2020

(photo © Depositphotos)

Jérémie en a plus qu’assez d’interpréter la partition « du prophète de malheur ». Il se sent trahi par Dieu et lui en veut.  À son époque, le Royaume de Juda est au bord du gouffre. Le roi Sédécias, mis sur le trône par les Babyloniens qui ont une première fois envahi Jérusalem en 597 avant J.-C., ne trouve pas mieux que de frapper à la porte des Égyptiens pour obtenir leur soutien face à l’Empire de Nabuchodonosor.

Jérémie, qui emprunte à Dieu son regard, voit bien que cela mène tout droit à un cul-de-sac. Il multiplie les alertes, annonce les malheurs qui, depuis le Nord, fonderont bientôt sur le pays. Mais bien peu d’oreilles veulent l’écouter ; on préfère à ses paroles dures, mais vraies, celles, plus rassurantes, des faux prophètes. Il reçoit donc, comme salaire de la fidélité à sa mission, mépris, railleries et persécutions.

Le voilà qui s’en plaint au Seigneur. Quoi de plus naturel? Nous connaissons tous ces moments où le vase déborde. Des échecs nous accablent, l’horizon est bouché. Chaque nouveau jour semble impossible à traverser : maladies, deuils, chômage, inquiétudes. L’envie nous prend de tout vouloir lâcher, de nous réfugier hors de notre vie en nous distrayant. Oublier ce qui va mal, ne serait-ce pas merveilleux?

Et puis, comme chez Jérémie, quelque chose monte de très loin en nous : l’écho d’une Parole qui vient d’ailleurs, une espérance indéracinable, un goût de vivre. Le feu couve sous nos cendres… Seigneur, quand le feras-tu redevenir feu brûlant?

Anne-Marie Chapleau, bibliste
Professeure à l’Institut de formation théologique et pastorale de Chicoutimi