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Écouter ou non la voix du berger

Jean 10, 1-1o : 4e Dimanche de Pâques (Année A)

Je ne sais pas comment ça se passe dans l’Au-delà, j’ignore comment les humains y peuvent communiquer entre eux. Mais je sais qu’après la famille, les amis et le trio de Jésus, Marie et Joseph, il y en a deux que je vais chercher des yeux, à savoir les auteurs des évangiles de Marc et de Jean. Je n’arrive pas à comprendre comment ils ont pu oser écrire comme ils l’ont fait, ni comment ils ont réussi à se faire publier. Pour vous faire partager mon étonnement, je vous présente quelques versets du second. C’est un scribe anonyme, qui, à la suite de ses rencontres avec des partisans de Jésus, a décidé de mettre par écrit ce qu’il avait compris de ce dernier. Il écrit à une époque où, de Rome, la grande Église est en train de devenir une organisation en bonne et due forme, et d’imposer sa structure et sa pensée à la grandeur de l’Empire. Aussi adresse-t-il, à sa fragile petite communauté, des paroles de résistances et de liberté qui vont traverser l’Histoire. Elles méritent d’être lues et relues.

Au chapitre 10 de son évangile, Jean parle de Jésus comme d’un berger. Ce mot dit tout. Un berger est un être qui vit en marge de la société, dans la solitude des pâturages, avec ses propres normes de conduite, n’ayant qu’une chose en tête : la protection et le bien-être de son troupeau. Dans le monde ambiant, les bergers sont craints et méprisés, parce qu’indomptés et indomptables. Par là, ce que Jean dit à sa communauté, c’est qu’elle n’est pas sous la gouverne d’un prêtre au service de son temple, d’un scribe au service de son organisation, d’un politicien au service des intérêts des puissants, mais d’un berger au service de son seul troupeau, contre tous ceux qui lui veulent du mal. Écoutons-le.

Jn 10,3 Les moutons écoutent la voix du berger quand il les appelle par leur nom, puisqu’ils lui appartiennent, et il les fait sortir [de l’enclos]. 4 Quand il les a tous fait sortir, les siens, il va devant eux, et les moutons le suivent parce qu’ils connaissent sa voix.

Il faut lire et relire ce texte, pour se convaincre qu’il dit bien ce qu’il dit. Le berger appelle ses moutons pour les faire sortir de l’enclos. Ce que Jean dit là est terriblement subversif. La tâche du berger, c’est de faire sortir ses moutons des systèmes, de tous les systèmes, de toutes les organisations dans lesquelles les humains s’enferment les uns les autres. Parce que la vie est ailleurs. L’évangéliste sait fort bien que c’est là chose très difficile à accepter pour les pauvres humains que nous sommes. Aussi explicite-t-il la condition nécessaire à sa réalisation : s’être fait appeler par son nom. En effet, pour être capable de s’engager sereinement sur le chemin tracé par Jésus, il faut avoir été interpellé par lui, s’être fait tracer dans le cœur l’orientation à donner à sa vie, et savoir qu’il marche devant, entraînant les siens à sa suite.

Le chemin n’est pas facile, mais c’est le seul qui conduise à la liberté :

Jn 10,7 La porte des moutons, c’est moi. Qui entre par moi sera libéré. Il pourra entrer, sortir et trouver à manger. 10 Moi, je suis venu pour la vie, et la vie en abondance.

Quand on accepte de passer par la porte ouverte par Jésus, on est libre vis-à-vis des systèmes et des organisations. On entre, on sort à volonté. On n’est l’obligé de rien ni de personne. L’important, la seule chose importante, c’est de vivre, et de trouver en soi la nourriture qui fait vivre. Elle ne peut venir d’ailleurs, quelle que soit l’autorité de ceux qui prétendent le contraire. Là-dessus, Jean a cette phrase dévastatrice :

Jn 10,8 Tous ceux qui sont venus avant moi, ce sont des voleurs et des bandits. Cette déclaration ne souffre pas d’exception. Elle vise tous les rois d’Israël et de Juda, ou d’ailleurs, tous les chefs d’État, pharaons ou césars, de quelque nationalité que ce soit, tous les grands prêtres, tous les gouvernements avec l’ensemble des systèmes qu’ils ont montés à leur profit et à celui de leur nation. Tous des voleurs et des bandits, parce qu’ils ont dépouillé les gens de leur liberté en les rendant esclaves de leurs systèmes.

Mais il y a plus. Jean parle au passé, parce qu’il s’adresse à sa communauté qu’il juge libérée de toute cette racaille. Il espère, cependant, qu’elle le restera, parce que les pressions sont fortes pour qu’elle rentre dans l’enclos, y rester à demeure, sans jamais en sortir par la porte de la liberté qui conduit à la nourriture de vie. C’est l’enjeu de la foi, qui se pose à tous les croyants et croyantes de l’Histoire, à la grandeur du monde, à travers les cultures.

Selon Jean, il m’est donné de durer dans la vie pour que j’aie le temps de prendre la seule grande décision qui compte, soit de croire la voix du berger qui m’appelle, ou d’écouter celle des voleurs et des bandits. Le berger est là, au cœur de moi, qui m’interpelle, les autres, je les vois chaque jour à la télé.

André Myre, auteur et professeur honoraire de la Faculté de théologie et de sciences des religions de l’Université de Montréal

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