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Les commencements et recommencements de la foi

Départ ou arrivée?

(photo © Depositphotos)

[…] Je dois d’abord vous dire d’où je parle. Je n’ai pas toujours été chrétien, j’ai été baptisé à vingt-cinq ans, après huit années de cheminement. Comment devient-on chrétien ? Je pourrais dire d’emblée : par chance. Une autre chance que j’ai, c’est, depuis mon baptême, d’accompagner des personnes commençant et recommençant dans la foi chrétienne. […]

Ce que nous disent commençants et recommençants sur le (re)devenir chrétien et qui peut déjà inspirer nos pratiques catéchétiques et pastorales

Le sens étymologique du mot katekein, « catéchèse », c’est « faire résonner la Parole à l’oreille de quelqu’un ». La notion de pratique catéchétique est donc plus large que la simple catéchèse des enfants ou que ce qu’on appelle d’habitude catéchèse... Dans le Rituel de l’initiation chrétienne des adulte (note 1), les personnes qui mettent en œuvre l’initiation chrétienne sont d’ailleurs nommées « catéchistes ».

On (re)devient chrétien.ne sur son propre itinéraire de vie, et chaque itinéraire de vie est différent. C’est donc au moment où se révèle la présence mystérieuse de Dieu dans les plis et replis de l’existence qu’une demande s’exprime. La foi naît petit à petit et c’est lorsqu’elle devient une évidence qu’elle s’impose comme quelque chose qu’on ne choisit pas. Demander le baptême, envisager un cheminement, ce n’est pas faire preuve de motivation. C’est obéir à une sorte d’impulsion intérieure qui vient comme à l’improviste : « Je n’y peux rien... Ça m’est venu comme ça... » Il est primordial de respecter la liberté des personnes, et la liberté de Dieu.

On devient chrétien.ne lorsqu’on risque des premiers mots pour formuler une demande. Sans qu’on ait à sa disposition le vocabulaire chrétien. On exprime son désir comme on peut... toujours en racontant son histoire. Quelle oreille avons- nous ? Comment prenons-nous les demandes qui nous sont faites ? Agacement parfois ?... Où sont les lieux où des personnes puissent raconter leur histoire ? Comment permet-on aux gens de balbutier des premiers mots de la foi ?

Quand on (re)devient chrétien-ne, il y a de la conversion dans l’air ! Mais prenons garde lorsqu'on emploie les « gros mots » de la foi ! Les commençants et recommençants n’aiment pas forcément ce mot « conversion ». Ils parlent plutôt le langage de tous les jours... de « retournement » (« J’en suis toute retournée ! »...). Aujourd'hui des jeunes et des adultes, s’ils ne se posent pas directement la question de Dieu, se posent des questions de vie, des questions existentielles. C’est de ces questions que nous devons partir... « Pourquoi je vis ce que je vis ? », par exemple, est une question sou vent en filigrane dans les demandes de (re)commencement. L’Église est là pour recevoir ce questionnement (sans y répondre de suite par des réponses dogmatiques). Nos programmes sont prêts, nos catéchismes sont écrits... Mais les réponses aux questions que nous faisons d’avance ne correspondent pas forcément aux questions de celles et ceux qui s’approchent de l’Église. Il y a même parfois un vrai hiatus, voire un gouffre entre les deux. Ne préparons pas trop nos réponses d’avance.

(Re)devenir chrétien-ne entraîne une déstabilisation, une crise. Ça travaille beaucoup à l’« intérieur » de la personne. Nous nous préoccupons de l’intérieur de l’Église, notre vision est ecclésiocentrée. L’accompagnement des catéchumènes et des recommençants nous apprend à déplacer notre « centre de gravité » vers l’« intérieur » de l’autre. Vers son propre lieu de rencontre avec Dieu. Accompagner le (re)devenir chrétien, ce n’est pas comme proposer un stage pour « mieux être soi », pour un bien-être personnel, ou pour l’entrée dans cette belle famille qu’est l’Église. C’est proposer la foi comme rencontre du Christ, comme confrontation à l’évangile, comme confrontation à la croix du Christ, comme un combat spirituel (voir par exemple l’étape des scrutins dans le RICA). Les paroles de Jésus, ça ne passe pas toujours. Proposer la foi, c’est proposer une crise permanente, pas un siège douillet dans l’Église pour la messe du dimanche.

Celles et ceux qui demandent à (re)devenir chrétien.nes parlent, dans leur décision de frapper un jour à la porte de l’Églsie, d’un déclic qui a provoqué cette décision. Il y a toujours un facteur déclenchant dans une démarche de foi, quelque chose qui ouvre une brèche, à partir de quoi un avenir s’ouvre dans une nouveauté à vivre. Interrogez-vous, dans votre propre vie de foi, il y a sans doute eu un ou plusieurs facteurs de ce type. Pour les débutants dans la foi, cela fait passer du : « il y a bien quelque chose... » un peu vague au : « je voudrais (re)devenir chrétien.ne ». Le déclic, élément déclencheur, est le « moment favorable » : « J’ai rencontré quelqu’un... », « On m’a demandé d’être marraine... », « Je vais me marier... » Nos schémas bien ancrés nous font parfois rater ce rendez-vous, ce « moment favorable » d’un début de chemin. Nous attendons à nos guichets ecclésiaux des gens conformes à ce que nous aimerions. Or, nous devons, là̀ encore, nous déplacer vers la porte d’entrée de l’autre. C’est Philippe, dans les Actes des Apôtres, qui monte dans le char de l’eunuque, et non l’inverse (Ac 8, 26-40).

Les commencements et recommencements de la foi nous font redécouvrir le christianisme comme une voie. Les premiers chrétiens s’appelaient la « Voie ». (Re)devenir chrétien-ne, c’est une marche à la suite de Jésus, ce n’est pas l’entrée dans une association qui orterait la mémoire d’un fondateur. Chemin, cheminement, sont des termes catéchuménaux par excellence. Les catéchumènes se reconnaissent dans la figure d’Abraham, celui qui se met en route, qui démarre... Les recommençants sont comme Nicodème, ils viennent de nuit, mais qui est là pour les recevoir ?... Nous proposons des préparations, des catéchèses, du contenu... mais proposons-nous une voie chrétienne ? Le modèle c’est bien sûr l’initiation chrétienne, avec ses étapes liturgiques articulées, tricotées, avec des temps, des périodes de cheminement. Et, pour le rituel, ça ne finit pas avec les sacrements d’initiation, puisqu’il y a un temps mystagogique et un anniversaire de baptême. Le dernier rite du baptême, la remise de la lumière, dit bien que le chemin est un chemin éclairé par le Christ, mais aussi que le baptisé est lui-même lumière (vêtement blanc) et que c’est bien de son propre chemin qu’il s’agit, pas d’un chemin tracé d’avance.

Roland Lacroix

Cet article avait été publié dans le Contact catéchuménat, septembre / octobre 2007.
Les numéros de 2005 à 2007 ont été retirés du site de l'OCQ en raison d'un problème de droits d’auteurs pour certaines photos.

Notes

1. Congrégation pour le culte divin, Rituel de l’initiation chrétienne des adultes, Desclée/Mame, 1997.


 

 

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